Kyouko et Yashiro sont à la cafétéria. Cette dernière est ailleurs, Yashiro la ramène sur terre en l’interpellant, et en lui disant qu’elle devrait commencer à manger. Inutile d’attendre Ren. Kyouko refuse, elle peut attendre. Alors Yashiro, tout sourire, lui demande si, par hasard, elle tient absolument à manger avec Ren. Kyouko réagit au quart de tour, en version démoniaque hystérique, elle nie totalement, et, penchée sur lui, justifie sa réaction par le fait qu’une novice comme elle ne doit pas manger avant son aîné. Reculant un peu, Yashiro lui dit qu’elle n’a pas besoin de faire une telle tête pour s’expliquer. Il lui fait remarquer ensuite qu’elle a tendance à réagir de façon exagérée à chaque fois qu’on parle de Ren… et se demande pourquoi. Cette question laisse Kyouko sans voix. Elle se rassit sur sa chaise, toute penaude, cherchant ses mots.
Heureusement, quelqu’un la sauve. La manager de Momose interrompt leur conversation pour demander si elle peut emprunter la caméra de Yashiro. Elle aimerait lui montrer la scène qu’elle a joué. Yashiro accepte, et comme la manager ne sait pas s’en servir, décide de l’accompagner à la table de Momose pour l’aider, laissant Kyouko derrière.
Kyouko, justement, repense aux réactions de l’actrice pendant le tournage. Rien d’étonnant, même les ténèbres (et ses petits démons) ne peuvent résister au sourire de Ren. On voit un petit démon fumant, au sol, brûlé par la radiance de son visage. Elle réfléchit plus loin, pour faire un parallèle entre la réaction de Momose quand Ren a failli lui lécher le doigt, une réaction instinctive, et la sienne, quand Ren a failli l’embrasser. Momose n’a pu s’empêcher de rougir, même en sachant qu’il était en train de jouer. Si elle avait été à sa place, si Momose avait été sur le point de se faire embrasser, elle aussi n’aurait pu empêcher son cœur de bondir dans sa poitrine… Kyouko se tape dans les mains, ravie de sa découverte : mais bien sûr ! Tout le monde aurait réagi comme elle dans ces circonstances ! C’est comme une révélation divine : elle n’a eu aucun sentiment profond, sa réaction a été parfaitement naturelle ! D’ailleurs, elle aurait ressenti la même chose avec quelqu’un d’autre. Ce n’est pas lié à lui, ou à elle, mais à cette situation ! Elle soupire, et sourie, les yeux joyeux, apaisée par cette explication. Ses battements de cœurs n’avaient pas de sens caché, et elle en est grandement soulagée. Ca n’était pas le signe d’un amour naissant. Elle se tourne vers l’aquarium de la cafétéria, calme. Tout va bien, elle n’est pas amoureuse.
Ren est toujours dans la limousine avec le président. Il est surpris par l’annonce du président : Ogata a décidé d’utiliser la scène qu’ils viennent de tourner pour le film. Ce n’était pourtant qu’un entraînement. Taquiner Momose, jouer du piano, Ren n’a joué de cette manière que pour convaincre le président. Ce dernier reconnaît que lui aussi ne voyait cela que comme un test. Mais…
*flash-back*
Ogata discute avec le président, après la répétition. Il lui explique pourquoi il tient à cette scène : c’est la première rencontre entre Mizuki et Katsuki en dehors du lycée. C’est une scène-clé dans le roman. Ogata aussi veut lui donner de l’importance, mais surtout, souligner que cette rencontre est différente, parce que son cadre est différent. En dehors du milieu scolaire, Katsuki et Mizuki ne voient plus les choses de la même manière. Jusqu’ici, Katsuki avait toujours gardé son masque de professeur. Là, c’est plus intime, avec un côté joueur. Ca permet à Mizuki de découvrir une autre facette de sa personnalité. Et considérant que la majorité de l’audience sera féminine, il faut qu’on puisse ressentir la surprise et la joie de Mizuki face à cette découverte.
Or aujourd’hui, Ren était vraiment Katsuki, et il leur a montré un Katsuki qu’ils n’avaient jamais pu imaginer. Tout le monde a été surpris par son jeu. Il veut que les téléspectateurs soient aussi surpris qu’ils l’ont été. Qu’ils découvrent cet amour douloureux que ce personnage porte en lui.
Il sourit grandement au président.
*fin du flash-back*
Voilà pourquoi Ogata veut garder cette scène, dans son intégralité. Le président ajoute que le scénario sera retravaillé pour que tout colle. Ren sourie, pensif, et répond un simple « Je vois », que le président n’a pas l’air d’apprécier : que penserait Ogata d’une réponse aussi fade ? Alors qu’il est évident que Ren s’est donné à fond pour jouer ce Katsuki, avec un courage désespéré. Il a même laissé transparaître son ancienne personnalité, qu’il avait pourtant scellé depuis son arrivée au Japon (on revoit le Katsuki cruel qui dit à Mizuki qu’elle n’a aucun intérêt pour lui, cf chapitre 73). Cette référence à son passé refoulé bloque Ren, ses mains tremblent et ses yeux scrutent le vide. Takarada le reprend alors : inutile de faire une telle tête. Il ne le critique pas, au contraire, il trouve que c’était une bonne chose de faire resurgir son ancien lui, rien qu’un peu. N’est-il pas temps qu’il accepte l’idée de se pardonner ?
Kyouko est sur le parking, choquée par la taille de la limousine. C’est sûr que là, elle ne risque pas de les louper. Mais comment font-ils pour manier une si grande voiture dans les rues étroites de Tokyo ? Elle s’approche. Elle pensait trouver Ren avec le président, elle ne s’est pas trompée, elle aperçoit son ombre à travers la vitre. Mais elle hésite sur ce qu’elle devrait faire : ils sont sûrement en pleine discussion… d’un autre côté, Ren ne sait pas où est la cafétéria. S’il retourne au studio et ne trouve personne, il va sûrement y rester, seul, sans manger. Elle devrait lui dire : « Mr Yashiro et moi vous attendons, alors venez s’il vous plaît »… sauf qu’elle n’a pas le courage d’entrer dans la limousine. Elle se penche à droite, se penche à gauche, hésitante. Elle se demande si Ren va se rendre compte de sa présence. Elle le fixe, et découvre son expression : une tristesse douloureuse, qu’elle ne lui avait jamais vu.
Le président conseille à Ren d’arrêter de se torturer. Dark Moon, qui l’a poussé à faire revenir son ancienne personnalité à la surface est certainement la meilleure des thérapies pour lui. Il a besoin de son ancienne personnalité, pour créer un Katsuki supérieur à celui d’Hotsu Shuuhei (l’acteur qui a joué ce rôle dans Tsukigomori). Ce nom ramène Ren sur Terre d’un coup, comme un électrochoc.
Et il relève la tête, faisant face au président. Cette réaction fait sourire Takarada… qui l’instant d’après affiche deux gros yeux et un air étonné. Il fixe quelque chose derrière Ren, et celui-ci, curieux, se retourne. Il voit alors Kyouko, faisant les cent-pas devant la limousine, en dessinant le chiffre de l’infini. Takarada se penche de l’autre côté de la limousine, pour mieux la voir, et se demande ce qu’elle est encore en train de fabriquer. L’air blagueur, il se tourne vers Ren en lui demandant si elle ne serait pas là pour l’attendre. Et recule d’un coup, visage horrifié. C’est… c’est pas possible ! Avec toutes les filles qui y a dans ce monde, pourquoi faut-il que ce soit elle ? Il est abattu par le désespoir, alors que Ren ne comprend pas de quoi il parle. Il relève alors la tête, et lui tend un miroir, lui disant que quiconque verrait sa tête comprendrait immédiatement ses sentiments pour Mogami (malheureusement, nous, lecteurs, ne pouvons pas la voir). Il a la même tête que quand il regardait Mizuki durant le test. Ren s’excuse, et se regardant dans le miroir, se reproche mentalement d’avoir laissé échapper cette expression.
Kyouko s’arrête d’un coup de marcher. Elle a eu un déclic, et pars en courant.
Ren s’est repris, et le président commente cette découverte : bah, d’un autre côté, c’est une dure à cuir, c’est mieux pour lui. Parce qu’il a toujours cette pensée « Je n’ai pas le droit d’être heureux », n’est-ce pas ? Ren se retourne vers lui, le visage triste et fataliste. Il sort de la limousine, à la recherche de Kyouko. Le président le regarde partir, se disant que c’est pour ça qu’il ne voulait pas qu’il joue Katsuki au début. Finalement, Ren a compris un des aspects de la personnalité de Katsuki, son innocence en amour. Et son côté sombre. Ce n’est pas encore parfait, mais… il revoit le visage sérieux de Ren quand il a mentionné Hotsu Shuuhei. C’est de bon augure.